Headache review – The Drone
En matière de rock, Ici D’Ailleurs n’a jamais fait dans la gaudriole, préférant choyer les parrains ombrageux de la mauvaise humeur à la française (Cloup, Bouaziz, le ex-Deity Guns/Bästard de Zëro) que de signer la première bande de mâcheurs de bubblegum venue.
D’où notre curiosité en apprenant l’adoption d’un jeune groupe polonais, rencontré par hasard sur leurs terres par le fondateur du label Stéphane Grégoire, et passé sous tous les radars jusqu’à ce que la sommité critique américaine Sasha Frere-Jones n’écrive dans le Los Angeles Times qu’il s’agissait de „l’un des meilleurs groupes de rock actuellement en activité”. Mais qui pourrait encore accorder un quelconque crédit à ce genre de déclaration en 2016 (ou alors La Femme est le sauveur de la pop française) ? On a donc écouté sagement ce troisième album des inconnus de Gdansk, qui est en effet, sans la moindre hésitation, une oeuvre sérieuse, dense, surtendue, longue en bouche, à mille lieues des modes y compris celle du revival 90’s. D’abord parce que Trupa Trupa ne puise pas ses liqueurs à n’importe quels tonneaux (Slint, Swans, Faust, le slowcore), mais surtout parce qu’il les re-distille d’une main de fer pour en tirer une potion unique, psychédélique et capiteuse, immédiatement addictive (un niveau de songwriting à faire tourner de l’oeil les plus blasés) et qui vieillira à coup sûr mieux que la piquette garage ou les piscines post-grunge qu’on nous sert quotidiennement. Un tord-boyau pour les fines gueules qui n’ont plus envie de rire, hors d’âge et hors compétition.