Recenzja Jolly New Songs – Froggy’s Delight
Après le formidable Headache sorti l’année dernière, nous ne pouvions qu’attendre beaucoup du nouvel et quatrième album des Polonais de Trupa Trupa. Le premier titre, „Against breaking heart of a breaking heart beauty” nous rassure d’emblée, et le reste du disque est à l’avenant, Jolly New Songs est une réussite.
Dans la continuité donc d’Headache, on retrouve ces influences (Sonic Youth, Slint, Pavement, Can, Mogwai, Sunns…) mêlées et digérées, ces atmosphères sombres et métalliques, ces accords souvent saturés et dissonants, ces mélodies entêtantes parfois pop, qui vous vrillent le cerveau. Une esthétique, à l’image de la superbe pochette du disque, peut-être pas si étonnante quand on sait que le groupe est originaire de Gdansk.
Mais Trupa Trupa avance pernicieusement. Il alterne les climats hypnotiques avec une réelle agilité, se montre capable de jouer intelligemment avec les tensions et les détentes, les passages martelés, électriques et ceux plus aériens. Et ce n’est pas le moindre des talents que d’être capable de marier le feu et la glace. Et si Trupa Trupa se montre plutôt très adroit dans cet exercice, c’est parce qu’il distille insidieusement son venin grâce à son attention portée aux compositions.
Une attention portée également aux mots, le leader Grzegorz Kwiatkowski a plusieurs livres de poésies à son actif, avec des textes ciselés, minimalistes et noirs : „none of us none of us none takes the name in vain none of us none of us none lays claims or complains none of us none of us none cheats or steals or lies none of us none of us none calls the name in vain, have a merciful eye cure our goats and cows keep us strong and wise in the evil’s house, none of us none of us none calls the name in vain none of us none of us none takes the name in vain none of us none of us none spells the name in vain none of us none of us none calls the name in vain, cause the sky is black and the sun burnt down and the lakes dried out the mystery bubbled out” („None Of Us”).
Jolly New Songs est donc un disque tourmenté, long en bouche (il ne se domptera pas en deux-trois écoutes rapides), loin de toute fadeur, plutôt un œil du cyclone. Cet album me rappelle une anecdote personnelle. Lors d’une tournée en Pologne avec un orchestre symphonique, notre bus s’était arrêté tard dans la nuit dans une gigantesque station essence éclairée d’énormes néons bleus aux allures de stations spatiales d’ex-Allemagne de l’est aux atmosphères froides, lugubres, presque surréalistes. Un sentiment étrange nous avait tous envahis entre quelque chose de presque effrayant mais plastiquement beau. Un très beau disque troublant.